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Augmentation des allergies : et si les épidémiologistes avaient « tout faux » ?
samedi 21 décembre 2002, par
L’épidémiologie fournit beaucoup de résultats, en particulier sur la prévalence des maladies allergiques, avec des chiffres allant parfois du simple au double. La méthodologie est souvent difficile à critiquer pour un non spécialiste, mais on peut penser qu’il existe des biais qui faussent les résultats. Qu’en est-il et que croire ?
Est-ce que l’augmentation des affections allergiques respiratoires est due à un effet de cohorte ? : A. Linneberg, N. H. Nielsen*, F. Madsen, L. Frølund, A. Dirksen and T. Jørgensen Centre for Preventive Medicine, Glostrup University Hospital, Glostrup,*Department of Dermatology, Gentofte University Hospital, Gentofte,Department of Internal Medicine B, Frederiksberg University Hospital, Frederiksberg andDepartment of Respiratory Medicine Y, Gentofte University Hospital, Gentofte, Denmark dans Clinical & Experimental Allergy 32 (12), 1702-1705.
Les modifications dans le mode de vie ou des facteurs environnementaux sont responsables d’une augmentation des maladies allergiques respiratoires. Pouvoir établir la période à laquelle l’augmentation de ces allergies a débuté, pourrait donner un fil conducteur pour identifier les facteurs responsables de cette augmentation.
Beaucoup d’études transversales ont montré que la prévalence des maladies allergiques diminue au fur et à mesure que l’âge augmente. Ceci pourrait refléter l’histoire naturelle de la sensibilisation.
D’un autre coté cela pourrait signifier que cette augmentation des sensibilisations pourrait être due en réalité à un effet de cohorte, c’est à dire qu’il y aurait une augmentation secondaire à l’augmentation des affections allergiques chez les sujets nés durant les dernières décennies.
– Objectifs de l’étude : le but de ce travail a été d’étudier les modifications de la prévalence des maladies allergiques en fonction de l’âge dans une cohorte de patients adultes.
– Méthodes :
* Au total 599 patients âgés de 15 à 69 ans ont participé à une étude transversale à partir d’une population générale en 1990.
* En 1998, ils ont été invités à un suivi et 64,4% (386/599) ont été revus.
* Des prélèvements sanguins ont été faits chez les patients en 1990 et en 1998, avec une analyse des IgE spécifiques vis-à-vis des 6 pneumallergènes fréquents, avec un dosage selon la même technique.
– Résultats :
La prévalence des sensibilisations (IgE spécifiques positive à au moins 1 allergène) augmente chez les patients qui ont moins de 30 ans au début de l’étude (1990), c’est à dire chez les patients nés dans les années 60 ou plus tard, alors que la prévalence n’est pas modifié parmi les patients qui avaient plus de 30 ans au début de l’étude.
– Conclusions : Ces résultats confirment que l’augmentation de prévalence des maladies allergiques respiratoires est due à un effet de cohorte. Ainsi, ce sont les modifications du mode de vie et des facteurs d’environnement qui sont survenus dans les années 60 qui ont pu être responsables de cette augmentation.
Ainsi les auteurs estiment que l’idée d’une augmentation actuelle des manifestations allergiques est fausse, et résulte d’un biais méthodologique par incorporation dans les études de cohorte de patients d’âges différents, les allergiques étant les sujets jeunes nés dans les années 60, alors que la prévalence n’a pas changé pour les patients plus âgés.
Cette notion est très importante à plus d’un titre :
* d’abord parce qu’elle confirme la difficulté à interpréter les données épidémiologiques et la nécessité de toujours douter.
* Ensuite parce qu’elle explique cette distorsion entre, d’une part des mesures préventives largement diffusées pour protéger l’environnement, et les résultats surprenant d’une augmentation qui reste constante de la prévalence des maladies allergiques : en fait c’est faux, les chiffres sont stabilisés et les mesures préventives doivent être efficaces.
* Enfin, ce n’est pas une modification actuelle qui est responsable de l’augmentation des maladies allergiques, mais des modification dans le style de vie ou dans l’habitat qui ont eu lieu dans les années 60.
Il faut donc reconsidérer les facteurs de risque de développement d’un terrain allergique.
Enfin il faut remarquer dans cette étude comme dans beaucoup d’autres, la confusion qui est faîtes entre sensibilisation et allergie. Un test cutané positif vis-à-vis d’un allergène ne signifie pas allergie : trop souvent ces notions sont ignorées, ce qui majore artificiellement les chiffres de prévalence des maladies allergiques.
Bref, il faut encore des études qui prennent en compte ces différents biais méthodologiques pour pouvoir enfin disposer de chiffres vrais.
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