La perception de l’obstruction bronchique : pas évident du tout !

lundi 24 février 2003 par Dr Alain Thillay5263 visites

Accueil du site > Maladies > Asthme > La perception de l’obstruction bronchique : pas évident du tout !

La perception de l’obstruction bronchique : pas évident du  tout !

La perception de l’obstruction bronchique : pas évident du tout !

lundi 24 février 2003, par Dr Alain Thillay

La perception de la dyspnée chez les asthmatiques est très différente d’un sujet à l’autre. Cette variabilité joue incontestablement un rôle dans la prise en charge thérapeutique de l’asthmatique. Cette étude espagnole tente de mettre en exergue les facteurs qui concourent à la manière de percevoir la dyspnée.

Perception de la dyspnée par des patients asthmatiques durant l’obstruction bronchique aiguë. : Martinez-Moragon E, Perpina M, Belloch A, De Diego A, Martinez-Frances ME. Servicio de Neumologia. Hospital de Sagunto. Espana dans Arch Bronconeumol 2003 Feb ;39(2):67-73

 Le but de cette étude était d’analyser les variations de la perception de l’obstruction bronchique aiguë chez des asthmatiques et d’essayer de définir les variables qui influent chez les différents individus.

 Nous avons étudié 153 asthmatiques en condition de stabilité, en utilisant une échelle de Borg (échelle de perception de l’effort) pour mesurer la perception de la dyspnée durant un test de provocation bronchique à l’histamine.

 Afin d’étudier la perception individuelle, nous analysions à la fois la valeur absolue de perception de la dyspnée sur l’échelle de Borg lorsque le VEMS (Volume Expiratoire Maximal en une Seconde) chutait de 20% (perception score 20=PS20)et la différence mathématique entre PS20 et dyspnée de base (variation du Borg, VB).

 Les résultats étaient les suivants :
* Les facteurs qui affectent le PS20 étaient l’anxiété, la dyspnée de base et la concentration requise pour entraîner une diminution de 20% du VEMS (PC20).
* Entre chaque niveau de sévérité de l’asthme, il existait des différences de la perception de la dyspnée lorsque le VEMS chutait de 20%, tels que les patients ayant un asthme léger et pas d’obstruction bronchique percevaient plus la modification de la dyspnée.
* La variation de l’échelle de Borg pendant le test de provocation bronchique se distinguait en 4 types de perception de la dyspnée : 15% percevaient de façon erronée la dyspnée, 13% la percevaient insuffisamment, 48% la percevaient normalement et 24% la percevaient de façon excessive.
* Ceux qui percevaient insuffisamment et ceux qui percevaient de façon erronée avaient un plus grand risque d’avoir des exacerbations sévères alors que les hypersensibles à la dyspnée demandaient des consultations médicales inutiles.
* Les sujets d’un niveau de qualité de vie bas avaient souvent une mauvaise perception ; les hypersensibles représentaient le second type le plus commun parmi les sujets de niveau bas de qualité de vie.

 En conclusion, un large pourcentage d’asthmatiques ne perçoit pas de manière appropriée l’obstruction bronchique aiguë et le moyen le plus simple pour évaluer leur perception est de calculer la variation de la dyspnée (échelle de Borg) lors du test de provocation bronchique. La manière de percevoir la dyspnée n’est pas prédictible, pourtant cette perception a un impact significatif sur les moyens thérapeutiques et la qualité de vie du patient, entre autres aspects.


Cette étude tente de mesurer quantitativement et qualitativement la perception de la dyspnée chez des asthmatiques dans des conditions codifiées.

Elle essaie aussi de déterminer les facteurs qui influent sur cette perception.

Par exemple, il faut retenir que l’asthmatique a une perception différente en fonction de la sévérité ; que lors de test de provocation bronchique seulement la moitié des patients perçoivent correctement leur dyspnée ; que les patients qui ont une perception erronée ou insuffisante de leur dyspnée s’exposent à un plus grand risque d’exacerbation sévère.

Si sur le plan expérimental cette étude est très démonstrative, elle est très éloignée des conditions de la consultation habituelle de tous les jours.

Toutefois, le praticien de terrain saura par un interrogatoire non orienté mais habile connaître le vécu de l’asthmatique, connaître la consommation de bronchodilatateur d’action rapide et comparer tout cela à des explorations fonctionnelles respiratoires minutieuses. Il pourra déterminer ainsi la qualité de perception de l’asthmatique.

Cette étude a le grand mérite de nous rappeler que nombre d’asthmatiques ressentent mal leur gêne respiratoire et donc sont trop souvent traités insuffisamment.

Abonnez-vous!

Recevez les actualités chaque mois