L’asthmatique s’enflamme souvent la nuit !

vendredi 7 mars 2003 par Dr Philippe Carré4159 visites

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L’asthmatique s’enflamme souvent la nuit !

L’asthmatique s’enflamme souvent la nuit !

vendredi 7 mars 2003, par Dr Philippe Carré

Les asthmatiques symptomatiques ont dans plus de 50 % des cas des symptômes nocturnes et/ou une oppression au petit matin, en rapport avec une variation circadienne de la bronchomotricité. Celle-ci est-elle associée aussi à une variation circadienne de l’inflammation des voies aériennes ?

Variation circadienne des cellules inflammatoires de l’expectoration dans l’asthme modéré. : Panzer SE, Dodge AM, Kelly EA, Jarjour NN. Pulmonary and Critical Care Section of the Department of Medicine, University of Wisconsin-Madison, Madison dans J Allergy Clin Immunol 2003 Feb ;111(2):308-12

 Contexte. L’asthme, comme d’autres conditions, se manifeste par un rythme circadien, avec une aggravation de la fonction respiratoire au petit matin comparativement avec la fin d’après-midi.

 Objectif. Comme l’inflammation à éosinophiles des voies aériennes est un mécanisme proposé pour expliquer l’aggravation de la fonction respiratoire, cette étude a évalué les variations circadiennes des éosinophiles dans les voies aériennes et sa relation avec la variabilité de la fonction respiratoire.

 Méthodes.
* Des tests de fonction respiratoire, une analyse de l’expectoration induite et un prélèvement sérique ont été réalisés à 7 heures du matin et 4 heures de l’après-midi chez 11 sujets allergiques avec asthme modéré.
* Ont été analysés dans l’expectoration la viabilité et le différentiel cellulaires, et le taux de neurotoxines dérivés des éosinophiles.
* Les taux d’IL 5 sériques ont été mesurés par méthode Elisa.

 Résultats.
* Les patients avaient une diminution significative du VEMS (médiane : 80% contre 85%, p=0.009) et une meilleure réversibilité bêta-agoniste (médiane : 13% contre 8%, p=0.024) au petit matin comparé avec la fin d’après-midi.
* L’analyse de l’expectoration montrait au petit matin une augmentation du nombre total de leucocytes (médiane : 4.3 x 10(6) contre 2.6 x 10(6), p=0.044) et d’éosinophiles (médiane : 7 x 10(4) contre 3.6 x 10(4), 0.024).
De plus, le taux des éosinophiles de l’expectoration était corrélé avec la réversibilité béta-agoniste (p= 0.019).
* Enfin, les taux d’IL5 sérique et de neurotoxines dérivés des éosinophiles des expectorations étaient augmentés de façon significative à 7 h du matin.

 Conclusion. Ces données suggèrent que les variations circadiennes de la fonction respiratoire dans l’asthme pourraient être en relation avec des modifications du recrutement et de l’activation des éosinophiles dans les voies aériennes.


Plusieurs hypothèses ont été évoquées pour rendre compte de la variation circadienne de la bronchomotricité, qui explique l’aggravation nocturne des symptômes asthmatiques (diminution nocturne de la clairance muco-ciliaire, exposition allergénique plus importante aux acariens de la literie, et surtout modifications de synthèse hormonale, avec en particulier une baisse nocturne de la synthèse du cortisol et des catécholamines).

L’inflammation bronchique étant une caractéristique de l’asthme, il était tentant d’imaginer que l’aggravation nocturne pouvait être corrélée à une augmentation de l’inflammation des voies aériennes, en rapport avec une infiltration plus importante en éosinophiles, cellules inflammatoires majeures dans l’asthme.

Cette très belle étude confirme cette hypothèse, en montrant que les éosinophiles, leurs médiateurs (ici les dérivés neurotoxiques), et les cytokines chimio-attractantes des éosinophiles (IL5) sont augmentés au petit matin, en corrélation avec une aggravation de l’obstruction bronchique. Ceci confirme la place de l’inflammation dans la physiopathologie de la maladie asthmatique.

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