Quelle combine : on tolère mieux les allergènes de guêpe en les recombinant dans le nez !

mercredi 19 novembre 2003 par Dr Philippe Carré5092 visites

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Quelle combine : on tolère mieux les allergènes de guêpe en les recombinant dans le nez !

Quelle combine : on tolère mieux les allergènes de guêpe en les recombinant dans le nez !

mercredi 19 novembre 2003, par Dr Philippe Carré

L’allergie au venin d’hyménoptères peut entraîner des réactions graves. Les patients à risque sont ceux exposés à des piqûres répétées ; le traitement préventif se heurterait au risque de réactions secondaires de l’immunothérapie. Des stratégies alternatives de traitement efficaces, simples et bien tolérées sont-elles possibles ?

Immuno-suppression allergénique spécifique par traitement muqueux avec l’allergène recombinant Ves v 5, allergène majeur du venin de Vespula vulgaris, dans un modèle murin d’allergie au venin de guêpe. : Birgit Winkler*, Caroline Bolwig, Ulla Seppälä, Michael D. Spangfort, Christof Ebner* & Ursula Wiedermann*

*Department of Pathophysiology, University of Vienna, Austria, and ALK-Abello, Horsholm, Denmark

dans Immunology 110 (3), 376-385.

 Contexte.
* Environ 5% de la population présente des réactions systémiques et 19% des réactions d’hypersensibilité locale aux piqûres d’insectes.
* Même si l’immunothérapie spécifique est très efficace dans le traitement de l’allergie au venin d’insectes, de nouveaux concepts de stratégies thérapeutiques avec le seul allergène responsable de l’allergie, sous sa forme recombinante, avec introduction de l’allergène par une voie moins invasive, pourraient être utilisés pour améliorer l’efficacité et la compliance thérapeutiques.

 But de l’étude.
* 1) Etablir un modèle de souris allergique au venin de guêpe, imitant le mode naturel de sensibilisation et
* 2) développer une stratégie de traitement préventif basée sur l’induction d’une tolérance muqueuse, en utilisant un allergène majeur du venin de guêpe sous sa forme recombinante, à savoir le Ves v 5 recombinant.

 Résultats.
* L’immunisation avec le venin de guêpe -avec ou sans adjuvant par l’hydroxyde d’aluminium- conduit à des réponses immunes de type TH2 comparables in vivo et in vitro.
* L’administration intra nasale de Ves v 5 avant la sensibilisation par le venin de guêpe résulte dans une réduction significative des niveaux d’anticorps spécifiques au venin (IgE / IgG2a), des réactions d’hyper sensitivité de type I in vivo et de la production de cytokines in vitro.
* Le traitement préalable avec le venin total était moins efficace et entraînait des effets secondaires toxiques à des concentrations plus élevées, suggérant un effet favorable de l’allergène de venin recombinant en application muqueuse.
* Des niveaux augmentés de RNAm du TGF et de l’IL10, par des techniques de transfert cellulaire, indiquent que l’immunosuppression après l’application du Ves v 5 intra-nasal est médiée par des mécanismes de régulation.
* Ceci est de plus confirmé par le fait que l’immunosuppression au Ves v 5 est associée à une suppression à un autre pneumallergène : Bet v 1.

 Conclusion.
* Cette étude montre que l’application intra-nasale du Ves v 5 recombinant prévient la sensibilisation allergique à tous les composants du venin de guêpe total.
* Comme l’allergie au venin d’insecte se développe en fonction de la fréquence des piqûres d’insectes, un traitement préventif basé sur l’induction d’une tolérance muqueuse avec l’allergène recombinant pourrait être intéressant pour les gens à haut risque d’exposition fréquente aux insectes piqueurs.


Les auteurs posent l’hypothèse qu’un traitement préventif de l’allergie aux venins d’hyménoptères pourrait être proposé aux sujets fréquemment exposés aux piqûres d’insectes, de façon à prévenir la survenue de réactions systémiques graves potentielles.

A ce jour, aucun traitement simple et dénué de risque n’est disponible.

Le but de cette étude était de proposer un modèle expérimental animal d’allergie, et de développer une stratégie thérapeutique d’immunisation, en utilisant d’une part une préparation allergénique moins dangereuse (allergène recombinant), et d’autre part une voie d’administration simple et bien tolérée (immunisation par voie nasale muqueuse).

L’utilisation d’allergènes recombinants permettrait de garder le pouvoir immunogène de l’extrait tout en diminuant le pouvoir allergisant et donc le risque d’effets secondaires ; cette étude démontre que l’administration par voie nasale de l’allergène recombinant Ves v 5 du venin de guêpe, avant la sensibilisation directe au venin, diminue la réponse à IgE au venin, ainsi que les réactions d’hypersensibilité et la production de cytokines ; par contre, l’administration préalable du venin total n’a pas d’efficacité comparable.

Il est donc possible d’imaginer que cette technique d’administration de l’allergène du venin, efficace, simple d’utilisation et bien tolérée, pourrait être proposée à titre préventif aux sujets exposés à risque. Elle sera certainement utilisée à l’avenir également à titre curatif chez les patients ayant présenté une réaction généralisée après piqûre, tenant compte de sa meilleure tolérance par rapport aux immunothérapies actuellement utilisées.

Enfin il faut signaler un dernier point intéressant dans cette étude de grande qualité, l’immunosuppression induite par le venin de guêpe semble s’étendre à d’autres immunisations, les auteurs ayant en effet constaté une suppression associée vis-à-vis de Bet v 1.

L’effet de cette technique d’immunisation par voie nasale pourrait donc passer par des mécanismes de régulation globaux de la fonction immunitaire, et pourrait ouvrir d’autres horizons thérapeutiques.

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