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Malaise en Malaisie : manger l’œuf y est lait !!
samedi 24 avril 2004, par
Comment traiter l’asthme lorsqu’on n’a pas forcément l’envie ou les moyens de prendre des médicaments ? La mode est au régime, pour maigrir, pour être beau, pour être intelligent alors pourquoi pas pour ne plus avoir d’asthme ni de maladie atopique ?
Les effets d’un régime d’exclusion des œufs et du lait dans la prise en charge de l’asthme de l’enfant : une étude pilote. : Yusoff NA, Hampton SM, Dickerson JW, Morgan JB.
Department of Nutrition and Dietetics, Faculty of Allied Health Sciences, Universiti Kebangsaan Malaysia, Jalan Raja Muda Abdul Aziz, 50300 Kuala Lumpur, Malaysia.
dans J R Soc Health. 2004 Mar ;124(2):74-80
Les effets bénéfiques d’un régime d’exclusion dans la prise en charge de l’asthme de l’enfant restent controversés et ont fait l’objet de peu d’études.
– L’objectif de ce travail a été d’analyser les effets d’un régime d’exclusion des œufs et du lait sur la survenue de symptômes chez des enfants asthmatiques.
– Méthodologie :
- Il a été réalisé chez 22 enfants entre 3 et 14 ans ayant un asthme diagnostiqué et classé en asthme persistant léger et modéré.
- Les régimes ont été réalisés en simple aveugle et de façon prospective, les parents ayant été invités à rejoindre volontairement le groupe éliminant les œufs et le lait ou leurs dérivés pendant 8 semaines, le groupe contrôle ne modifiant pas son régime habituel.
- 13 enfants ont été inclus dans le groupe « éviction » et 9 dans le groupe contrôle.
- Un pédiatre a évalué les enfants avant et après l’étude.
- Une évaluation des ingestas sur 7 jours a été réalisé avant pendant et après la période de mise en place du régime dans les 2 groupes.
- Un prélèvement sanguin a été réalisé chez chaque enfant pour déterminer la spécificité des Ig spécifiques alimentaires, et si cela était possible un peak flow a été réalisé.
– Résultats :
- En se basant sur les recommandations internationales en terme d’alimentation, les enfants dans le groupe traité ont ingéré une quantité significativement moindre en terme d’énergie (p<0.05).
- Après les 8 semaines d’étude et en se comparant aux valeurs de base, les taux sériques moyens des IgG anti-ovalbumines et anti bétalactoglobulines étaient sur le plan statistique significativement réduit (p<0.05) pour tous les enfants dans le groupe traité.
- Par contre, les valeurs des anticorps anti-ovalbumine IgG dans le groupe témoin étaient significativement augmentés et ceux des anti-bétalactoglobulines pratiquement non modifiés.
- La valeur des IgE totales est resté inchangée dans les 2 groupes.
- Après la période d’étude, le peak-flow pour les enfants qui pouvaient le réaliser, était significativement augmenté dans le groupe traité mais pas dans le groupe témoin.
– Conclusion : Ces résultats suggèrent que même pendant une courte période de temps de 8 semaines, un régime pauvre en lait et en œuf peut réduire les manifestations atopiques et améliorer la fonction pulmonaire des enfants asthmatiques.
D’après ce travail, les auteurs concluent qu’un régime d’éviction des oeufs et du lait permet d’améliorer l’asthme ainsi que les manifestations atopiques chez des enfants âgés de 3 à 14 ans, au prix d’une alimentation significativement plus faible en terme d’énergie.
Actuellement une idée curieuse circule chez les fabricants de régime et chez les médecins qui pensent que brimer les patients en leur imposant un régime d’éviction est une bonne mesure thérapeutique.
Certes, ces régimes ont représenté l’arme favorite des « médicastres » pendant des siècles jusqu’à ce que Claude Bernard vienne imposer un raisonnement nécessaire à tout acte thérapeutique.
Cette idée du régime d’éviction sans support allergique sous jacent est bien entendu controversé, et heureusement.
Ce travail qui voudrait défendre l’exclusion du lait et des œufs n’emporte pas la conviction, c’est le moins que l’on puisse dire. Il repose en effet sur un très faible nombre de patients avec une grande disparité en terme d’age et donc de maladies allergiques, car il est difficile de comparer l’asthme d’un enfant de 3 ans et celui d’une enfant de 14 ans.
Les mesures objectives n’ont pas été réalisées chez tous les enfants, en particulier toutes celles qui concernent l’étude de l’asthme, à priori l’objectif initial de ce travail.
Il n’est pas démontré de variation du taux des IgE spécifiques, qui seules peuvent être appliquées dans un raisonnement allergique, les IgE totales n’étant plus depuis plusieurs années un marqueur d’atopie.
Enfin, bien qu’exprimé d’une façon pudique, ce régime d’exclusion alimentaire semble induire une carence en terme d’apports énergétiques.
A notre avis, il n’y a dans cette étude aucune preuve réelle d’un apport bénéfique d’un régime d’exclusion du lait et des œufs.
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