Sucre dans le venin, diagnostic dans le pétrin !

mardi 14 septembre 2010 par Dr Hervé Couteaux528 visites

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Sucre dans le venin, diagnostic dans le pétrin !

Sucre dans le venin, diagnostic dans le pétrin !

mardi 14 septembre 2010, par Dr Hervé Couteaux

Les épitopes glucidiques croisants (CCD) affectent fortement les résultats du test d’activation des basophiles dans l’allergie aux venins d’Hyménoptères. : Mertens, M., Amler, S., Moerschbacher, B. M. and Brehler, R. (2010),

Cross-reactive carbohydrate determinants strongly affect the results of the basophil activation test in hymenoptera-venom allergy.

dans Clinical & Experimental Allergy, 40 : 1333–1345. doi : 10.1111/j.1365-2222.2010.03535.x

 Contexte :

  • En matière d’allergie au venin d’hyménoptères, les sérums de 60% de patients présentent une réactivité in vitro au venin d’abeilles (VHB) et de guêpe (yellow jacket) (YJV).
  • Ce phénomène est principalement causé par des IgE spécifiques (IgE) dirigées contre des épitopes glucidiques croisants (CCD).
  • Que ces anticorps puissent ou non induire des symptômes cliniques est un débat de longue date.

 Objectifs :

  • L’objectif de cette étude était d’étudier l’activité biologique du complexe CCD-IgE et la pertinence du test d’activation des basophiles (BAT) chez des patients allergiques au venin d’hyménoptère présentant des complexes CCD-IgE.

 Méthodes :

  • L’activité biologique du complexe CCD-IgE a été analysée par l’application de YJV et de VHB natifs et déplétés en CCD dans des BAT réalisés avec le sang de 62 patients allergiques au venin d’hyménoptère et de 16 témoins non allergiques.
  • Selon les résultats des tests cutanés intradermiques (TC) avec YJV et VHB et l’existence de CCD-IgE, les patients ont été classés en six sous-groupes.

 Résultats :

  • Chez les patients mono-positifs aux TC avec des complexes CCD-IgE, et donc double-positifs pour les IgE, le BAT aux venins natifs a également été doublement positif jusqu’à 67% des patients.
  • En revanche, les BAT avec venins déplétés en CCD n’ont été positifs que pour le venin positif en TC.
  • Cependant, l’activation des basophiles avec le venin négatif en TC était significativement plus faible qu’avec le venin positif en TC.
  • Chez les patients mono-positifs aux TC sans CCD-IgE, les BAT ont été mono-positifs avec le venin positif en TC aussi bien dans sa forme native que dans la forme déplétée en CCD.
  • Les patients CCD-positifs avec des TC doublement positifs constituaient un groupe hétérogène, avec la majorité des patients CCD-positifs également double positifs avec les formes natives des deux venins, mais mono-positifs avec les venins déplétés en CCD.

 Conclusion :

  • Les tests BAT In vitro démontrent clairement l’activité biologique du complexe CCD-IgE.
  • Cependant, parce que la plupart des patients ont montré des TC mono-positifs et que l’activation des basophiles avec le venin négatif en TC était significativement plus faible qu’avec le venin positif en TC, les données actuelles suggèrent que le complexe CCD-IgE est cliniquement non pertinent chez ces patients.

Les réactivités CCD ne semblent pas être cliniquement pertinentes en matière d’allergie aux venins d’Hyménoptères.

C’est la principale conclusion de cette étude qui a le mérite de s’intéresser aux CCD dans un domaine où ils posent problème (Rappelons que les recommandations de l’EAACI dans le choix d’un extrait pour une immunothérapie aux venins d’Hyménoptères ne résolvent pas l’embarrassante question des perturbations induites par les CCD…)

Comme le rappelle Henri Malandain, l’abaissement du seuil du CAP à 0,1 kU/l n’a pas que des conséquences positives : Dans l’étude Guerti K, Bridts CH, Stevens WJ, Ebo DG. Wasp venom-specific IgE : towards a new decision threshold ? J Investig Allergol Clin Immunol 2008 ;18:321-323, il a été trouvé 8 sujets avec CAP abeille et 10 sujets avec CAP guêpe Vespula entre 0,1 et 0,35 kU/l parmi les 12 contrôles (atopiques).

La réactivité CCD est peut-être plus complexe dans l’allergie aux venins que pour les pollens par exemple, et il est possible que, sans jouer un rôle direct en clinique, ces glycoépitopes participent à l’activation cellulaire…

Au total, il est clair que nous devons progresser dans notre connaissance des mécanismes physiopathologiques en jeu dans l’allergie au venin d’Hyménoptères, tant nous sommes démunis à résoudre de façon satisfaisante les problèmes de double positivité, entre autre…

Les tests d’inhibitions réciproques, dont on attendait beaucoup, sont loin d’être toujours concluant, étant réalisés le plus souvent sans épuisement préalable des IgE-CCD.

Nous renvoyons les lecteurs avides d’en savoir plus à l’excellent article Hyménoptères et CCD d’Henri Malandain sur AllerData

NB : Yellow jacket est un nom « commun » désignant de nombreuses espèces de guêpes du genre Vespula pour certains et également du genre Dolichovespula pour d’autres.