Diagnostic de l’allergie à l’œuf et seuils, rien de vraiment concret !

mardi 29 septembre 2015 par Dr Alain Thillay1702 visites

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Diagnostic de l’allergie à l’œuf et seuils, rien de vraiment concret !

Diagnostic de l’allergie à l’œuf et seuils, rien de vraiment concret !

mardi 29 septembre 2015, par Dr Alain Thillay

Est-il possible de faire un diagnostic de l’allergie à l’œuf cru, chauffé et cuit chez l’enfant à l’aide de seuils ? Une revue systématique. : Calvani M, Arasi S, Bianchi A, Caimmi D, Cuomo B, Dondi A, Indirli GC, La Grutta S, Panetta V, Verga MC.

Is it possible to make a diagnosis of raw, heated, and baked egg allergy in children using cutoffs ? A systematic review.

dans Pediatr Allergy Immunol 2015 : 26 : 509–521.

 Contexte :

  • Le diagnostic de l’allergie IgE dépendante à l’œuf s’effectue à l’aide, à la fois, d’une histoire clinique compatible et des résultats des tests cutanés et des niveaux des IgE totales sériques spécifiques.
  • Ces deux tests ont une bonne sensibilité mais une faible spécificité.
  • Pour cette raison, le test de provocation orale (TPO) reste l’étalon-or du diagnostic final.

 Objectif :

  • Le but de cette étude était d’examiner systématiquement la littérature afin d’identifier, d’analyser, de synthétiser la valeur prédictive des tests cutanés et des IgE spécifiques du blanc d’œuf et des principaux allergènes de l’œuf et de revoir les seuils proposés dans la littérature.

 Méthode :

  • Au total, 37 articles ont été inclus dans cette revue systématique.
  • Des études ont été regroupées selon le degré de cuisson de l’œuf utilisé pour le TPO, l’âge et le type d’allergène utilisé pour effectuer le bilan allergologique.

 Résultats :

  • Chez les enfants de moins de 2 ans, l’allergie à l’œuf cru semble très probable lorsque les tests cutanés avec l’extrait blanc d’œuf sont ≥4 mm ou si les IgE spécifiques sont ≥1,7 kUA / l.
  • Chez les enfants âgés de 2 ans ou plus, le TPO pourrait être évité lorsque les tests cutanés avec l’extrait blanc œuf sont ≥10 mm ou avec du blanc d’œuf natif si ≥14 mm ou les IgE spécifiques sont ≥7.3 kUA / l.
  • De même, l’allergie aux œufs chauffés peut être diagnostiqué si les tests cutanés avec l’extrait blanc d’œuf sont> 5 et> 11 mm chez les enfants de <2 et ≥ 2 ans, respectivement.

 Conclusions :

  • D’autres études mieux conçues sont nécessaires pour déterminer le seuil de diagnostic des IgE spécifiques et des tests cutanés pour l’allergie à l’œuf chauffé et cuit au four.

L’allergie à l’œuf, très fréquente chez l’enfant, pose la problématique de sa confirmation sans en passer par le test de provocation oral en double aveugle contre placebo, coûteux et non dénué de risque. Les études tentent ainsi de déterminer des valeurs seuils des tests cutanés et des IgE spécifiques afin de faire l’économie du TPO.

Comme le rappellent les auteurs italiens de cette étude, tests cutanés et IgE spécifiques ont certes une excellente sensibilité mais, malheureusement, une faible spécificité (peu de faux négatifs mais trop de faux positifs).

Ces chercheurs ont effectué une revue systématique de 37 études, soigneusement sélectionnées, qui ont été réparties dans différents groupes compte tenu du degré de chauffage de l’œuf, de l’âge des jeunes patients et du type d’allergène utilisé, tout cela comparé aux résultats du TPO.

Ils ont donc vite constaté une hétérogénéité des méthodologies par exemple pour ce qui concerne la cuisson des œufs.

S’agissait-il d’une cuisson en milieu humide ou d’une cuisson en milieu sec plus performante sur la dénaturation des protéines de l’œuf ?

Même hétérogénéité concernant le type d’allergène, extraits commerciaux, natifs…

Pour les tests de provocation, certaines études ont eu recours à un simple TPO en ouvert, alors que d’autres ont pratiqué des TPO en double aveugle contre placebo.

Quant aux IgE spécifiques, la plupart des études mesuraient les IgE spécifiques du produit blanc d’œuf, seules deux études ont eu recours aux IgE spécifiques de l’ovalbumine et 3 de l’ovomucoïde.

Dans ces conditions, il est facile de comprendre que ces études n’apportent pas grand-chose.

En pratique, on retiendra que pour ce qui concerne l’allergie à l’œuf cru, 95% des enfants allergiques sont correctement identifiés par les valeurs seuils des tests cutanés en extraits commerciaux et en natif, et, des IgE spécifiques chez l’enfant de moins ou de plus de 2 ans.

D’accord avec les auteurs pour dire qu’il faudrait pratiquer des études de grandes envergures avec la même méthodologie.

Et à présent, pour rester « pratiquo-pratique » que tirer de tout cela ?

Ne s’agit-il pas d’une sorte de discussion, à l’instar de celles sur le sexe des anges, très théorique et sans grand intérêt ?

En effet, dans la très grande majorité des cas, l’allergie à l’œuf guérit en deux ou trois ans, parfois plus.

Dans l’état actuel de nos connaissances incomplètes sur ce sujet, comme le montre très bien cette étude, il faudrait avoir recours systématiquement au TPO.

Pour ma part, je réintroduis très tôt la biscuiterie industrielle –contenant de l’œuf-, ce qui correspond à un chauffage élevé et sec.

Puis, dans un délai d’un an, toutes les préparations cuites contenant de l’œuf, quel que soit le mode de cuisson.

En enfin, réintroduction de l’œuf visible en commençant par l’œuf dur, puis omelette ou œufs au plat, bien cuits des deux côtés, pour finir, par régime normal.

Cette démarche a le grand mérite de dédramatiser la situation et d’impliquer les parents qui deviennent acteurs de la guérison de leur enfant.

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