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Prévention des allergies : il va vous falloir un bon avocat
lundi 4 août 2025, par
La recherche en allergologie a étudié pendant plusieurs années l’influence de l’alimentation maternelle sur les risques d’allergies chez l’enfant. Plusieurs études ont analysé les effets de régimes alimentaires variés (type méditerranéen, végétarien), mais peu ont porté sur l’impact d’aliments spécifiques. L’étude KuBiCo (Kuopio Birth Cohort), prospective, publiée en 2025 dans Pediatric Research, apporte une réponse originale en s’intéressant à la consommation d’avocats pendant la grossesse et au risque ultérieur d’allergie alimentaire chez le nourrisson.
Méthode
- L’étude repose sur la cohorte finlandaise KuBiCo, initiée en 2012 à Kuopio et ayant inclus près de 8000 femmes enceintes, avec un suivi rigoureux des enfants jusqu’à plusieurs années.
- Les informations nutritionnelles ont été recueillies à l’aide d’un questionnaire en ligne sur la fréquence des aliments consommés (163 items), rempli au premier et au troisième trimestre de la grossesse.
- Les participantes ont été classées comme consommatrices ou non d’avocat selon qu’elles déclaraient en consommer (> 0 g) à au moins un des deux temps de collecte.
- Les réactions allergiques des enfants ont été recueillies à l’âge de 12 mois à l’aide d’un questionnaire parental, avec quatre variables dichotomiques : rhinite, wheezing paroxystique, eczéma et allergie alimentaire.
- Un modèle de régression logistique a été utilisé pour comparer le risque relatif (odds ratio) entre enfants de mères consommatrices et non consommatrices, avec ajustement sur de nombreux facteurs confondants : âge maternel, IMC, niveau d’étude, tabagisme, allaitement, accouchement par césarienne, admission en néonatologie, qualité globale du régime alimentaire (score AHEI-P), consommation d’alcool, score de dépression postnatale (EPDS).
Pour en savoir plus sur le score AHEI-P
Résultats
- Parmi les 4 647 femmes éligibles, 2 272 ont été incluses dans l’étude finale.
- L’âge moyen des mères était de 31,1 ans ; 81 % ne fumaient pas ; 57 % avaient un niveau d’étude > 16 ans.
- Les consommatrices d’avocat avaient un meilleur profil global : IMC plus bas, allaitement plus long, alimentation de meilleure qualité, moins de tabagisme, accouchements par césarienne moins fréquents.
- L’incidence des allergies alimentaires chez les enfants à 12 mois était de :
- 4,2 % chez les enfants de mères non consommatrices d’avocat,
- 2,4 % chez ceux de mères consommatrices.
- Le risque relatif ajusté (OR) était de 0,564, soit une réduction de 43,6 % du risque de survenue d’une allergie alimentaire (p = 0,030).
- Une réduction non significative a été observée sur le wheezing (OR = 0,779 ; p = 0,085).
- Aucune différence n’a été retrouvée pour la rhinite ou l’eczéma.
Discussion
- C’est la première étude à rapporter une association directe entre consommation maternelle d’avocat et réduction du risque d’allergie alimentaire chez l’enfant.
- Ce résultat s’inscrit dans la continuité de données déjà disponibles sur les régimes méditerranéens, riches en fibres, acides gras monoinsaturés, vitamines et antioxydants.
- L’avocat contient :
- 13,3 g de lipides monoinsaturés,
- 9,5 g de fibres alimentaires,
- 2,6 mg de vitamine E (18 % des ANC),
- 0,93 mg de zinc (élément impliqué dans la tolérance immunitaire).
- Les mécanismes physiopathologiques plausibles sont :
- modulation de l’immunité innée via les acides gras et antioxydants,
- programmation immunitaire fœtale par les métabolites microbiens dérivés des fibres (acides gras à chaîne courte),
- rôle des micronutriments (zinc, vitamine E) sur la maturation des réponses Th2/Th1.
- Les limites de l’étude :
- donnée nutritionnelle déclarative (risque de biais de mémoire),
- issue allergique également rapportée par les parents, sans confirmation médicale dans tous les cas,
- une seule population régionale (Kuopio, Finlande), réduisant l’extrapolation à d’autres contextes,
- près de 50 % des participantes initiales exclues de l’analyse finale (non réponse, données manquantes).
- Le caractère observatif de l’étude n’autorise pas à conclure à un lien causal, bien que le design prospectif et les ajustements renforcent la robustesse des résultats.
- La protection semble spécifique à l’allergie alimentaire (et non à l’eczéma ou la rhinite), probablement du fait du moment de survenue plus précoce des symptômes (introduction des aliments vers 6-9 mois).
Conclusion
Cette étude finlandaise bien menée suggère que la consommation d’avocats pendant la grossesse est associée à une réduction du risque d’allergie alimentaire chez l’enfant à 12 mois. Les explications possibles sont multiples : la teneur élevée en fibres, en graisses monoinsaturées et en antioxydants favorise le développement immunitaire du fœtus. L’avocat s’inscrit ainsi comme un aliment d’intérêt dans le conseil nutritionnel prénatal. Toutefois, des études complémentaires, avec confirmation des diagnostics allergiques et évaluation des effets à plus long terme, sont nécessaires pour traduire ces résultats en recommandations officielles.
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La question de l’influence de l’alimentation maternelle sur la tolérance immunitaire de l’enfant revient souvent en consultation. Cette étude apporte un éclairage intéressant et accessible : intégrer l’avocat dans le régime alimentaire prénatal serait associé à une diminution du risque d’allergie alimentaire chez le nourrisson. Bien sûr, ce n’est pas la consommation d’un seul aliment qui transforme l’immunité, mais ce fruit s’avère être un marqueur d’un ensemble de choix nutritionnels favorables (régime riche en fibres, graisses de qualité, micronutriments…). Dans la pratique, cela nous encourage à proposer aux patientes un conseil simple, clair et facilement applicable : consommer régulièrement des fruits et légumes frais, variés, et de bonne densité nutritionnelle. L’avocat, fruit désormais courant et très peu éco-responsable, s’intègre aisément à une alimentation diversifiée et pourrait devenir un symbole alimentaire positif en allergopédiatrie.
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