Nous avons longtemps cru que les aliments cuits étaient sans danger...

mercredi 6 septembre 2006 par Dr Hervé Couteaux7856 visites

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Nous avons longtemps cru que les aliments cuits étaient sans danger...

Nous avons longtemps cru que les aliments cuits étaient sans danger...

mercredi 6 septembre 2006, par Dr Hervé Couteaux

L’allergie alimentaire reliée au pollen de bouleau concerne 50 à 70% des patients polliniques. C’est une question encore mal connue, dont la compréhension a beaucoup progressé grâce à l’allergologie moléculaire. Cette étude de Barbara Bohle apporte des éléments nouveaux aux conséquences pratiques importantes.

Cuisson des aliments reliés au pollen de Bouleau : conséquences divergentes pour les réactivités médiées par les IgE et par les cellules T, in vitro et in vivo. : Barbara Bohle, PhDaCorresponding Author Informationemail address, Bettina Zwölfera, Annice Heratizadeh, MDb, Beatrice Jahn-Schmid, PhDa, Yuliya Dall Antonia, PhDc, Mareike Alter, MDb, Walter Keller, PhDc, Laurian Zuidmeer, PhDd, Ronald van Ree, PhDd, Thomas Werfel, MDb, Christof Ebner, MDe

a From the Department of Pathophysiology, Center for Physiology and Pathophysiology, Medical University of Vienna
b Department of Dermatology and Allergology, Hannover Medical School, Hannover
c Karl-Franzens University, Institute of Chemistry, Graz
d Department of Experimental Immunology, Amsterdam Medical Centre, Amsterdam
e Allergy Clinic Reumannplatz, Vienna

dans JACI Volume 118, Issue 1, Pages 242-249 (July 2006)

 Contexte :

  • Bet v 1, un allergène majeur du pollen de bouleau, réagit de façon croisée avec des allergènes alimentaires homologues, provoquant des syndromes d’allergie orale (OAS) médiés par les IgE.
  • Pour éviter cette allergie, les praticiens de l’allergologie alimentaire et des guides de conseils recommandent de consommer la nourriture reliée au pollen de bouleau cuite.

 Objectif :

  • Nous avons cherché à évaluer l’induction de réactions, in vivo et in vitro, médiées par les IgE et les cellules T, par ces aliments reliés à Bet v 1 après cuisson.

 Méthodes :

  • Des recombinants de Bet v 1, Mal d 1 (Pomme), Api g 1 (Apium graveolens : Céleri) et Dau c 1 (Daucus carotta : Carotte) ont été incubés à des températures croissantes.
  • Les structures des protéines ont été déterminées par dichroïsme circulaire.
  • Le largage des médiateurs a été évalué par des tests d’activation des basophiles.
  • Des PBMC et des lignées de cellules T avec une spécificité épitopique connue ont été stimulées avec des allergènes alimentaires natifs et cuits.
  • Des patients allergiques au pollen de bouleau avec des antécédents de syndrome oral et d’exacerbation d’eczéma atopique consécutifs à l’ingestion de pomme, céleri ou de carottes frais ont été testés à nouveau par des tests de provocation en double aveugle contre placebo avec les aliments respectifs sous forme cuite.

 Résultats :

  • In vitro, les allergènes alimentaires cuits ont perdu leur capacité à se lier aux IgE et à induire le largage de médiateurs mais avaient le même potentiel d’activation des cellules T spécifiques de Bet v 1 que les protéines natives.
  • In vivo, l’ingestion d’aliments cuits reliés au pollen de Bouleau n’a pas induit d’OAS mais a provoqué des aggravations d’eczéma atopique.

 Conclusion :

  • La réactivité croisée entre Bet v 1 et les aliments reliés intervient indépendamment de la réactivité croisée IgE-médiée in vitro et in vivo.
  • Chez les patients atteints de dermatite atopique, la réaction immune peut même se manifester sous la forme d’une réaction cutanée d’eczéma retardé.
  • L’opinion selon laquelle les aliments reliés au pollen peuvent être consommés sans conséquences allergologiques doit donc être reconsidérée.

 Implications cliniques :

  • La consommation asymptomatique d’allergènes alimentaires reliés au pollen peut entraîner des réactions retardées au niveau cutané, médiées par les cellules T, chez des patients allergiques au pollen et porteurs d’eczéma atopique.

Manger des aliments reliés aux pollens après cuisson peut paraître n’entraîner aucune conséquence allergologique.

Cette étude démontre que, contrairement aux idées communément admises jusqu’ici, les aliments cuits qui n’induisent aucun symptôme immédiat (dans le cadre du syndrôme bouleau-fruits, légumes) peuvent tout à fait stimuler les cellules T et engendrer des réactions retardées.

Nos fidèles lecteurs se souviennent que cette étude avait fait l’objet d’une première communication par Barbara Bohle lors du congrès d’allergologie moléculaire de Rome organisé par Adriano Mari, créateur du site http://www.allergome.org., dont nous nous étions fait l’écho sur allergique.org en Avril dernier.

Cette étude remet en question notre pratique allergologique pour ce qui concerne les conseils à ceux de nos patients allergiques aux pollens de Bouleau qui présentent une ou plusieurs allergies alimentaires reliées à ce pollen.

Le syndrome Bouleau-fruits et/ou légumes est dépendant de la géographie.

La sensibilisation au pollen précède l’allergie alimentaire.

La pomme n’est pas le seul aliment concerné :

  • Les fruits des Rosaceae (abricot, pêche, pomme, prune, poire cerise, brugnon, nectarine, amande)
  • Noisette, Céleri, Kiwi, Pomme de terre, Persil, Fruits du Jacquier (Artocarpus heterophyllus, de la famille des Moracées)
  • soja et arachide (famille des Fabacées).

Pour les personnes intéressées par le sujet, voici quelques références bibliographiques :

  • Mittag D, Vieths S, Vogel L, Becker WM, Rihs HP, Helbling A, et al. Soybean allergy in patients allergic to birch pollen : Clinical investigation and molecular characterization of allergens. Journal of Allergy & Clinical Immunology. 113:148-54, 2004.
  • Mittag D, Vieths S, Vogel L, Wagner-Loew D, Starke A, Hunziker P, et al. Birch pollen-related food allergy to legumes : identification and characterization of the Bet v 1 homologue in mungbean (Vigna radiata), Vig r 1. Clin Exp Allergy 35:1049-1055, 2005.
  • Jung, P ; Sesztak-Greinecker, G ; Wantke, F ; Goetz, M ; Jarisch, R ; Hemmer, W. Prevalence of cross-sensitisation to soy allergens in patients with birch pollen allergy and allergenicity of different soy products.

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Vos commentaires

  • Le 6 janvier 2016 à 21:04, par THOMAS Aurélie En réponse à : Nous avons longtemps cru que les aliments cuits étaient sans danger...

    Bonjour,

    Ma fille de 10 ans a fait un malaise après une crise d’urticaire (choc anaphylactique), la cause n’a pas encore été trouvée. Des tests sanguins n’ont pas été prescrits dans les 3 à 4 jours après. Sa tension est remontée à 9,3 après sa reprise de conscience. Elle est allergique au cacahuètes et un certains pollen d’arbre. Par ailleurs, je venais de monter un meuble neuf en kit 48 h avant.
    Lors de son malaise on m’a conseillé qu’elle voit son médecin traitant dans la journée, il est venu, il est reparti. Le soir des vertiges l’ont repris, le 15 ma dit de lui donner du célestène pour aider la tension à remonter.
    Est-ce normal que ma fille n’est été prise en charge et sous observation ? Est-ce normal qu’il n’y ai pas eu prescription d’une prise de sang pour éventuellement essayer d’en déterminer la cause ?
    Merci pour votre réponse.
    A.T