L’œsophagite à éosinophiles : pathologie allergique émergente.

mercredi 13 mai 2015 par Dr Alain Thillay2038 visites

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L’œsophagite à éosinophiles : pathologie allergique émergente.

L’œsophagite à éosinophiles : pathologie allergique émergente.

mercredi 13 mai 2015, par Dr Alain Thillay

Le régime d’éviction alimentaire orienté est utile chez les enfants atteints d’œsophagite à éosinophiles indépendamment de la gravité des symptômes. : Ekaterini Syrigou1,*, Aspasia Angelakopoulou2, Maria Zande1, Ioanna Panagiotou2, Eleftheria Roma2 andConstantinos Pitsios1
DOI : 10.1111/pai.12389

dans Vol. 26 Issue 3
Pediatric Allergy and Immunology

 Contexte :

  • IPP et corticostéroïdes font partie de la pharmacothérapie principalement utilisée pour traiter l’œsophagite à éosinophiles (OE) tandis que le régime diététique adapté constitue également une option efficace.

 Objectif :

  • Le but de cette étude était de comparer l’efficacité du régime d’éviction spécifique chez des enfants présentant des symptômes légers d’OE à un groupe d’enfants présentant des symptômes modérés à sévères.

 Méthodes :

  • Trente-cinq enfants, âgés de 7 mois à 12 ans, atteints d’OE, ont été inclus dans l’étude.
  • Ils avaient tous une histoire clinique de symptômes évoquant un reflux gastro-œsophagien (21 enfants, groupe A) ou des symptômes plus sévères (14 enfants, groupe B).
  • Le diagnostic a été confirmé après deux mois préliminaires de traitement par IPP et par une fibroscopie œsogastroduodénale.
  • Peu après le diagnostic, les patients subissaient des tests allergologiques à la recherche d’IgE réactivités (tests cutanés à lecture immédiate en extraits commerciaux et natifs ; IgE sériques spécifiques) et des tests épicutanés de l’atopie (en natif) à l’encontre du lait de vache, œuf, blé, riz, maïs, pomme de terre, arachide, soja, poulet, bœuf, porc et poisson.
  • Une alimentation adaptée durant 12 mois a été prescrite selon les résultats des tests.
  • Les patients du groupe B poursuivaient l’IPP pendant deux mois, tandis que les stéroïdes topiques per os étaient également prescrits pour les 5 premiers mois après le diagnostic, suivi d’une utilisation « si nécessaire » pour le reste de l’étude.
  • L’endoscopie était répétée à la fin de l’étude.
  • Un groupe de contrôle de 20 nourrissons et enfants, apparemment en bon santé, appariés en âge et sexe, ont été étudiés quant à leur réactivité aux tests épicutanés alimentaires natifs afin d’évaluer la spécificité des résultats.

 Résultats :

  • Trente-deux patients avaient au moins un test allergologique positif (test épicutané, IgE spécifique/PT ou les deux) alors que 24/35 des patients étaient atopiques.
  • Pour les tests de détections d’IgE réactivité, pour un aliment donné, le résultat était considéré positif devant toute positivité des PT ou des IgE sériques.
  • Globalement, la détection d’IgE réactivité était positive chez 12 des 21 cas du groupe A et chez 12 des 14 cas du groupe B.
  • Pour ce qui concerne les tests épicutanés natifs, la positivité était retrouvé chez 30 des 35 patients atteints d’OE ; 17/21 dans le groupe A et 13/14 dans le groupe B.
  • Lait et œuf étaient les allergènes les plus souvent positifs lors des tests épicutanés.
  • 32 patients ont été informés afin de pratiquer un régime d’éviction qui a été mené à terme chez 15/18 du groupe A et chez 12/14 du groupe B.
  • Une amélioration des symptômes a été rapportée par 26/27 des patients qui ont terminé l’étude.
  • L’utilisation de corticostéroïdes per os, à la demande, a sensiblement diminué au cours de la période dans le groupe B.
  • Une remarquable réduction des éosinophiles a été observée dans les biopsies ; à partir d’une valeur initiale de 42,84 ± 18,08, celle-ci diminue de 6,41 ± 3,20 un an après.

 Conclusion :

  • Tous les enfants atteints d’œsophagite à éosinophiles et ayant des symptômes bénins voyaient disparaître tous symptômes et avoir un nombre normal d’éosinophiles dans la muqueuse œsophagienne après un an d’un régime d’éviction.
  • Les patients atteints d’œsophagite à éosinophiles modérée à sévère avaient la même amélioration, indiquant qu’un régime d’éviction est un traitement complémentaire efficace des corticostéroïdes topiques per os.

La prévalence de l’œsophagite à éosinophiles est en constante augmentation depuis une bonne dizaine d’années. Ce point est discuté du fait de l’amélioration des moyens d’investigations qui pourrait faire croître artificiellement cette prévalence. Toutefois, les études montrent, compte tenu de ce biais, que cette forte prévalence est bien réelle s’inscrivant ainsi dans l’augmentation des maladies allergiques IgE dépendantes.

D’ailleurs, il a été observé que la majorité des patients souffrant d’OE présentait des manifestations d’allergie IgE dépendante comme rhinite, asthme, eczéma, allergie alimentaire.

Dans la population globale, enfants et adultes, la prévalence de l’allergie s’établit à 60% des patients avec OE.

Cette étude émane du département d’allergologie de l’hôpital d’Athènes (Grèce), les auteurs ont voulu prouver l’intérêt de l’éviction alimentaire dans une population pédiatrique atteinte d’OE.

En effet, si l’éviction alimentaire empirique semble couronnée de succès dans 70 à 80% des cas, pour autant, aucune étude solide n’est venue jusqu’alors en faire la preuve.

La méthodologie de l’étude apparaît robuste, sélection d’enfants souffrant d’OE démontrée, tests de l’IgE réactivité et tests épicutanés alimentaires, éviction alimentaire orientée par les résultats de ces tests sur 12 mois.

Les résultats sont éloquents quant au contexte atopique de l’œsophagite à éosinophiles, puisque sur les 35 enfants sélectionnés 32 avaient au moins un test positif.

Pourtant, seuls 24 enfants avaient un contexte atopique, ce qui tend à signifier que l’OE pourrait être un mode d’expression isolé de la maladie atopique.

Sans revenir sur les détails des résultats, il faut noter que lait de vache et œuf sont les deux trophallergènes les plus souvent retrouvés impliqués dans cette population.

A retenir aussi, l’intérêt des tests épicutanés de l’atopie qui sont sensibles et spécifiques.

Cette étude a plusieurs intérêts.

D’abord, elle rappelle à l’allergologue de terrain que la maladie atopique s’enrichit.

Souvenons-nous de l’époque où nous recevions un patient suspect d’allergie alimentaire quelques fois par an, à présent, c’est tous les jours ; il faudra maintenant toujours avoir à l’esprit l’OE, particulièrement chez l’enfant, et consacrer une part de l’interrogatoire à la recherche de signes en faveur de l’existence de cette pathologie allergique émergente.

Bien sûr, tout bilan alimentaire devra, dans ce cas, se pratiquer lorsque l’œsophagite à éosinophiles a été démontrée, FOGD et biopsies.

Enfin, la mise en évidence de l’allergie alimentaire devra passer par les prick-tests, les IgE sériques spécifiques, et, nous l’avons vu, sans oublier les tests épicutanés alimentaires natifs.

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