Accueil du site > Editorial > novembre 2025 : pas de répit pour l’allergie
novembre 2025 : pas de répit pour l’allergie
jeudi 27 novembre 2025
On pourrait se laisser abattre : plus d’allergies, plus de pollens voir plus – Définition , plus de contraintes… Et pourtant, en regardant les dernières publications d’allergique.org, on voit surtout autre chose : une spécialité qui se défend, se structure, se modernise et… qui progresse, franchement.
Tout commence par la voix d’Atchoum. Dans le dernier épisode, « Mythes et légendes des allergies », il démystifie les rumeurs persistantes, comme on défait une valse de résultats de prick-tests mal interprétés. On y aborde notamment les mythes entourant l’allergie « psychosomatique », la prétendue « allergie à l’iode » et l’interdiction fantasmée des tests cutanés chez les enfants de moins de sept ans. Il montre aussi comment le lactose et le gluten sont devenus des boucs émissaires universels. En d’autres termes, de la pédagogie, de l’humour, et une arme de plus contre les fake news qui polluent nos consultations.
Côté articles, le tour du monde commence en Chine. Les sociétés de médecine traditionnelle chinoise publient leur propre guideline sur la rhinite allergique, le « Bi Yuan ». Ce n’est pas ARIA, loin de là, et la rigueur méthodologique reste très variable. Cependant, le signal est clair : partout sur la planète, la rhinite allergique est reconnue comme une vraie maladie qui mérite des recommandations, une hiérarchisation des preuves, même imparfaites, et une réflexion structurée. À nous, allergologues, de rester fermes sur la science (corticoïdes nasaux, AIT, biothérapies), mais aussi d’être ouverts à discuter acupuncture et phytothérapie avec des patients qui y ont recours, sans les laisser seuls dans les méandres d’Internet.
Grâce à l’étude PREVALENCE-D menée par le réseau UCARE, le dermographisme ne sera plus relégué à la section « curiosités de couloir ». Il fera maintenant partie intégrante du grand chapitre des urticaires chroniques. On estime sa prévalence mondiale à environ 6 %. Il a un impact réel sur la qualité de vie et présente des liens étroits avec l’urticaire chronique spontanée. On n’est plus dans le « votre peau réagit un peu trop », mais dans une maladie fréquente, classée, mesurée et traitable par les mêmes algorithmes (antihistaminiques de seconde génération, parfois des biothérapies). Moins de fatalisme et plus de protocoles : ça va dans la bonne direction.
Le climat, lui, ne nous oublie pas. Selon une étude sur les incendies de végétation et les maladies atopiques, les panaches de fumée, riches en PM2,5, en gaz irritants et en mélanges très oxydants, aggravent l’asthme, la rhinite et la dermatite atopique. Dans certains cas, cela entraîne une augmentation des visites aux urgences. Il ne s’agit plus seulement d’une intuition « on voit plus de crises quand ça brûle », mais de risques quantifiés qui peuvent être utilisés pour informer, adapter les plans d’action et plaider auprès des autorités. L’allergologie sort du cabinet pour s’intégrer au cœur des politiques environnementales.
En matière de traitement, la désensibilisation sublinguale à l’arachide chez les jeunes enfants nous fait progressivement entrer dans une allergologie de précision. En analysant les IgE et les IgG4 spécifiques d’Ara h 2 et d’Ara h 6, l’étude met en évidence des profils immunologiques prédictifs de rémission, des ratios IgG4/IgE à surveiller, et confirme qu’un début précoce augmente les chances d’un avenir plus paisible pour ces enfants. Bien qu’on ne dispose pas encore d’un « score de rémission » standardisé, on n’est plus dans l’obscurité totale : la biologie moléculaire commence à éclairer les décisions prises auprès des familles et, demain, nos stratégies.
Même logique côté venins : l’article « Divination : le sang de l’allergique… »explore comment les marqueurs biologiques (IgE, composants, tests fonctionnels) peuvent aider à mieux prédire le risque et la réponse à l’immunothérapie au venin d’hyménoptères. Alors que la prise de décision reposait auparavant principalement sur la clinique et un certain art du jugement « à la louche », des profils plus détaillés émergent maintenant pour affiner l’indication, la durée du traitement et la discussion sur le risque résiduel. Moins de divination, plus de probabilité : la sécurité y gagne.
Finalement, une étude italienne met en évidence le rôle du numérique dans l’innovation médicale. Les médecins et les patients atteints d’asthme adorent les applications, les plateformes web et les inhalateurs connectés… mais ils n’en parlent presque pas ensemble. Ce décalage, désormais documenté, est une formidable opportunité : intégrer ces outils dans le plan d’action, inclure leur usage dans la consultation, clarifier les questions de données de santé et de responsabilité. L’allergologie ne se limite plus à l’utilisation d’inhalateurs et de corticoïdes : elle a désormais développé une expertise dans l’utilisation d’applications, de capteurs et de technologies de santé mobile.
Les brèves, elles, montrent que la spécialité progresse aussi sur la scène publique et réglementaire.
Quand le Collectif national des Allergies se rend au Sénat pour un colloque, c’est comme si 18 millions de Français atteints d’allergies prenaient place dans l’hémicycle. En effet, cette rencontre permet de mettre en évidence le « fardeau » des allergies, d’aborder l’organisation des soins, la prévention et la formation, transformant ainsi cette question médicale en un véritable enjeu politique.
Dans le même temps, la HAS publie un guide sur le bon usage de l’intelligence artificielle générative en santé. Loin de l’IA-gadget, ce texte pousse à encadrer les usages, valider les outils, vérifier les biais. Pour les allergologues, qui voient arriver des modèles capables d’analyser spirométries, journaux de symptômes, prévisions polliniques ou comptes-rendus de consultations, c’est une boussole bienvenue : l’innovation oui, mais avec garde-fous.
Autre bonne nouvelle : la brève sur l’activité physique dans l’asthme de l’enfant renverse une vieille peur. Le sport n’est plus l’ennemi qu’on tolère à petites doses, c’est un outil thérapeutique qu’on prescrit, avec recommandations structurées à la clé. De quoi aider les familles à sortir du cercle « asthme = fragilité » pour entrer dans « asthme contrôlé = enfant qui bouge, qui joue, qui court ».
Enfin, l’alerte sur les produits de contraste pour échographie, en particulier Sonovue, rappelle que l’imagerie « soft » n’est pas exempte de risques d’allergies. Cependant, le message est rassurant : des précautions claires et des procédures d’évaluation allergologique sont en place, et il est possible de sécuriser l’examen plutôt que de l’annuler. L’allergologue conserve son rôle de facilitateur d’accès aux soins, même en présence de bulles de contraste dans les vaisseaux.
Au final, que racontent nos actualités ce mois de novembre ? Qu’entre les murs du studio Atchoum, les guidelines chinoises, les mégafeux de forêt, les IgG4 d’Ara h 2, les algorithmes d’IA et les bancs du Sénat, l’allergologie avance, se questionne, se précise. Elle ne prétend pas tout soigner du jour au lendemain, mais elle s’efforce de documenter et de traiter de manière équitable, tout en renforçant la protection. Elle commence même à être entendue bien au-delà de la salle d’attente. Et si, finalement, le véritable progrès était là : une spécialité qui garde les pieds sur terre, le nez dans les articles… et l’oreille dans un podcast qui n’a pas peur de dire tout haut ce que beaucoup murmurent encore dans les couloirs.
Voir en ligne : Pas de répit pour l’allergie
Recevez les actualités chaque mois

Le podcast des allergies c'est Atchoum